Le recul grave de l'allaitement maternel n'interpelle pas seulement les femmes mais toute la société, a affirmé le professeur Amina Barakat, pédiatre néonatologue et nutritionniste, au cours d'une rencontre de sensibilisation à Kénitra à l'occasion de la semaine nationale de promotion de l'allaitement au sein.
Le chiffre inquiétant de 15 pc de femmes qui allaitent exclusivement au sein au Maroc a motivé cette campagne de promotion, a-t-elle dit dans une déclaration à la MAP.Normalement, a-t-elle ajouté, toutes les femmes devraient allaiter au sein jusqu'à six mois. Cette désaffection, a souligné le Pr. Amina Baraka, a des conséquences sur la santé du bébé et des répercussions sur le plan social et économique, parce que qui dit maladie dit dépense pour la santé pour la famille et un coût pour la société.
Les causes, selon elle, sont multifactorielles. "Il y a la motivation de la femme et la motivation de la société et sur les lieux de travail des femmes. C'est une affaire de toute la société et non seulement de la femme", a-t-elle insisté."Ce qui est paradoxal, c'est que les pays développés sont très en avance par rapport à nous dans la pratique de l'allaitement au sein, alors qu'eux aussi sont passés par des modes de vie similaires à ce que nous vivons dans notre pays", a-t-elle dit, estimant que "ce n'est pas seulement le développement qui a fait qu'on a oublié quelque chose de naturel et physiologique, c'est également le fait qu'on n'a pas mis l'accent dessus pendant longtemps".
Le Pr. Barakat a insisté sur l'importance de l'allaitement au sein au moins durant les six premiers mois et donné l'exemple de pays européens qui, vu la valeur nutritionnelle du lait maternel et la protection qu'il offre contre les infections, ont créé des "lactariums", centres de collecte, d'analyse, de traitement et de distribution de lait maternel aux établissements hospitaliers.
Au cours de cette rencontre, organisée par la direction provinciale de la santé, l'assistance, en grande majorité féminine, a notamment débattu du régime alimentaire de grossesse et d'allaitement et des cas où le lait maternel pourrait constituer un danger pour le bébé.
Au Maroc, le ministère de la santé applique un plan d'action quinquennal (2008-2012) pour la promotion de l'allaitement au sein et de lutte contre son recul, que la ministre de la santé, Mme Yasmina Baddou, a qualifié de "préoccupant".
Selon des statistiques du ministère, l'allaitement exclusivement au sein au niveau national a chuté de 52 pc en 1992 à 32 pc en 2004, puis à 15 pc en 2006.
Selon la même source, le nombre de femmes allaitant au sein exclusivement de 0 à 6 mois varie selon le milieu de résidence, le niveau d'instruction et le niveau de vie. Ainsi, 18 pc de femmes en milieu rural allaitent au sein contre 12 pc en milieu urbain. Cette variation apparait aussi entre les femmes n'ayant pas de niveau d'instruction, qui sont 18 pc à allaiter au sein contre 14 pc chez les femmes ayant un niveau du primaire et 8 pc chez celles ayant un niveau du secondaire.
Pour ce qui est du niveau de vie, le nombre de femmes pratiquant l'allaitement au sein est plus important chez les pauvres (21 pc) que dans les milieux les plus riches (10 pc).
Le plan quinquennal s'assigne pour objectif de porter, d'ici 2012, à 50 pc le taux d'allaitement maternel exclusif durant les 6 premiers de la vie. Pour y arriver, le ministère prévoit, notamment, le renforcement des compétences des professionnels de santé en matière de nutrition de l'enfant et de prise en charge nutritionnelle des nourrissons et jeunes enfants atteints de maladies aiguës ou à besoins spécifiques, l'équipement des structures sanitaires en matériel de dépistage et de suivi de l'état nutritionnel du nourrisson et du jeune enfant, la création d'un environnement favorable pour la pratique de l'alimentation au sein, la révision de la législation protégeant l'allaitement maternel et la mise en oeuvre du code national de commercialisation des préparations pour enfants.
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